Suite à l’échec de l’initiative pour des multinationales responsables nous avons publié un post instagram qui a provoqué une stupeur médiatique vraiment disproportionnée à notre sens. Il relève de notre responsabilité de n’avoir pas suffisamment explicité notre propos, alors nous revenons à ce sujet avec des lignes plus compréhensibles. Ce post n’a pas été écrit en consultation avec tout-e-s les habitant-e-s de la ZAD : nous sommes un collectif divers et nous acceptons cette diversité. Localement, notre lutte est celle de la protection de la Birette, et de montrer qu’il est anormal qu’Holcim ait un tel poids alors que la forêt se meurt. Le Mormont est un symbole de cette destruction massive de la nature. Nous avons la chance de bénéficier ici d’un soutien large et notre action se déroule sans violence, tout en créant un impact important nous permettant de parler à la fois de l’usage disproportionné du béton, et plus globalement du climat et de l’écologie.
Mais en l’occurence notre post concernait un autre enjeu : l’échec de l’initiative pour des multinationales responsables. Cet échec souligne encore une fois l’énorme disproportion entre l’exploitation du Sud global et l’inaction des pays du Nord qui reste normale. Nous parlons de ce contexte, et croyons bien avoir le droit, en tant que collectif, de parler d’autre chose que de notre combat local de la ZAD de la Birette – surtout car nous nous sentons concerné-e-x-s par le sort de notre planète en général. Nous voulons donc resituer notre propos qui a été le fait d’amalgame, de distorsion et d’incompréhension. Cela dit, il est peu étonnant que les gardiens des multinationales crient au scandale dès que possible, défendant les intérêts économiques sans écouter nos préoccupations vitales. Dans ce contexte, certain-e-x-s semblent accepter de vivre en paix avec une loi qui tolère et accepte que des enfants meurent du travail forcé dans des pays du Sud ou que des populations entières aient de graves problèmes de santé à cause des activités des multinationales (cf: le film « Multinationales L’Enquête »). C’est également accepté que les multinationales ravagent la planète jusqu’aux limites des ressources disponibles et essentielles à nos vies (cf:rapport du GIEC).
Dans ce contexte, nous voulons dire que nous comprenons le possible recours au sabotage par des groupes qui n’ont pas d’autres choix, là où iels vivent, lorsque cela fait des décennies que les multinationales et leurs activités meurtrières détruisent irrémédiablement la nature et restent à jamais impunies. En effet, il est étrange de parler de violence quand on imagine un sucre dans un moteur, alors même que des multinationales ont recours quotidiennement au sabotage continu de la planète sans être jamais reconsidérées, punies ou régulées par la loi (vu l’échec de dimanche). Bloquer une machine ne saura à notre avis jamais égaler le niveau de violences que subissent les populations exploitées dans les pays du Sud global ni les destructions environnementales causées. On ne voit pas, donc, de quel Etat de droit vous parlez : de celui qui accepte que des enfants continueront de mourir, que des populations entières seront toujours délogées (en Colombie vers les mines de Glencore par exemple), que des réfugié-e-s climatiques devront quitter leur terre à cause d’un réchauffement climatique causé par une minorité et qu’iels n’auront pas choisi ? Comment parler d’Etat de droit quand les intérêts économiques de l’Etat se permettent de jouir de violences normalisées, soutenue par l’inaction globalisée face aux catastrophes en cours ? Notre message n’est pas celui « d’activistes violents » mais de personnes qui réfléchissent et osent questionner dans le débat public la possibilité de stopper une destruction menée par les grandes industries contre le vivant. Ce texte n’est pas une dangereuse apologie de la violence gratuite – pourquoi ferions-nous cela ? Mais au contraire, le témoignage de personnes sensibles, attérées par le massacre planétaire et cherchant des sentiers pour sortir de l’ornière… Et comprennent que certains choisissent des sentiers moins faciles lorsque le reste des moyens a été épuisé. Il est peu étonnant que les gardiens de l’État de droit crient au déni de démocratie sans questionner l’inertie de la démocratie suisse actuelle.
Notre action à la Birette, soutenue par de nombreux citoyen-e-x-s de tous bords, vise à rééquilibrer le débat afin que David puisse être à armes égales avec Goliath. Elle se poursuit sans violence. Nous n’avons pas mené de telle action sur la ZAD et ceci n’est pas prévu. Mais nous voulions affirmer notre détresse face à l’avenir inchangeable de la planète, et que nous comprenons et nous montrerons solidaires à d’autres luttes qui n’auraient pas les mêmes moyens que nous d’être entendu-e-x-s pour contrer la violence des multinationales et leur toute puissance. D’ailleurs, l’action contre des biens matériels respecte l’intégrité physique des personnes, à l’inverse de certaines actions des multinationales (Rapport de Greenpeace sur les atteintes commises sur les droits humains et l’environnement ; rapports de Public Eye sur Vale international à Brumadinho). En outre, nous ne sommes pas de « joyeux campeurs », mais des personnes prêtes à sacrifier notre confort et nos habitudes pendant des semaines, bravant le froid, la pluie et un virus afin de défendre notre avenir gravement en péril, comme cela est scientifiquement documenté. Les institutions pseudo-démocratiques continuent de nous désespérer avec leurs échecs permanents et c’est pourquoi nous cherchons à sauver et protéger ce qui soutient la vie sur cette Terre